Une entreprise peut être mise en danger par sa gouvernance ou par des conflits graves existant entre ses associés. Il est alors nécessaire de faire désigner un administrateur qui assurera la gestion courante le temps que la crise traversée par l’entreprise se dénoue.

Loi Asap : la commande publique sur le devant de la scène

La loi d’« accélération et de simplification de l’action publique », dite loi Asap, a été publiée le 8 décembre 2020. Cette loi « chorale » modifie l’état du droit dans des domaines aussi variés que l’urbanisme, les enquêtes publiques ou encore le patrimoine. Mais surtout, en cohérence avec son acronyme, elle a procédé « as soon as possible » à des modifications destinées à répondre aux conséquences de la crise sanitaire pour les acteurs de la commande publique, qu’ils soient acheteurs ou prestataires.

UN RELÈVEMENT TEMPORAIRE DU SEUIL DE MISE EN CONCURRENCE DES MARCHÉS DE TRAVAUX METTANT LES ACHETEURS FACE UN DILEMME CORNÉLIEN.

Avec pour objectif affiché de relancer l’activité dans le domaine du BTP, l’article 142 de la loi Asap permet aux acheteurs publics de conclure de gré à gré, sans publicité ni mise en concurrence, des marchés de travaux pour un montant allant jusqu’aux 100 000 euros HT. Le choix d’établir ce seuil à un tel niveau est d’autant plus impressionnant qu’il n’était que de 4 000 euros HT jusqu’en 2011 (soit une multiplication par 25 en dix ans).

La liberté laissée aux acheteurs publics n’est toutefois pas illimitée. En premier lieu, sauf nouvelle intervention du législateur, le rideau se baissera sur cette mesure le 31 décembre 2022. En second lieu, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision relative à l’examen de constitutionnalité de la loi Asap, cette dispense de mise en concurrence « n’exonère pas les acheteurs publics du respect des exigences constitutionnelles d’égalité devant la commande publique et de bon usage des deniers publics ». Une particulière vigilance sera nécessaire pour se conformer à cette didascalie des sages du Palais-Royal. En effet, les acheteurs publics ayant conclu des contrats de gré à gré devront être capables de justifier de la pertinence de leur choix. La bonne gestion des deniers publics et la preuve de celle-ci ne seront pas choses aisées en l’absence de mise en concurrence, plus encore pour des travaux ponctuels sans référence possible au tarif d’un précédent contrat. Or, toute improvisation sur ce sujet risque d’entraîner une critique sévère de la chambre régionale des comptes en cas de contrôle.
Les acheteurs auront certainement recours aux « demandes de devis », mais pour de tels montants, ce choix soulève de nombreuses difficultés. En effet, un acheteur se soumettant volontairement, mais sans en avoir l’obligation, à une procédure de mise en concurrence doit en respecter l’intégralité des règles. À titre d’exemple, face à une entreprise demandant la communication des raisons pour lesquels son devis de 95 000 euros n’a pas été choisi, donner une réponse reviendrait à admettre qu’il y a eu des critères de sélection, et donc mise en concurrence, sans que ne soient respectées les obligations de publicité attachées à un marché de ce montant. À l’inverse, ne pas répondre reviendrait à enfreindre l’obligation de transparence pesant sur chaque acheteur public, tout en créant un risque de velléité contentieuse de l’entreprise évincée. À l’instar de Corneille, le législateur a placé les acheteurs, tels Rodrigue, face à deux exigences inconciliables : d’un côté, la volonté d’une relance économique rapide s’abstenant de mise en concurrence, et de l’autre, la nécessité impérative de garantir le bon usage des deniers publics par la transparence, l’égalité de traitement et la liberté d’accès aux marchés publics en application de l’article L3 du Code de la commande publique (CCP).

UN NOUVEL ACTE DU CODE DE LA COMMANDE PUBLIQUE : L’INTÉGRATION DES CIRCONSTANCES EXCEPTIONNELLES.

Sans attendre Godot, et afin de répondre plus rapidement à une éventuelle prochaine crise, le législateur a créé un livre VII intitulé : « Dispositions relatives aux circonstances exceptionnelles ». Ces nouveaux articles L2711-1 à L2728-1 reprennent globalement les mesures instaurées temporairement durant l’état urgence sanitaire. En cas de survenance de circonstances exceptionnelles, le pouvoir réglementaire pourra notamment autoriser les acheteurs à prendre des mesures pour faire face aux éventuelles difficultés. Les délais de réception des offres, de même que la durée des contrats en cours, pourront ainsi être prolongés. Concernant les entreprises, elles ne pourront être sanctionnées si elles démontrent leur incapacité, sans charge excessive, à remplir leur obligation durant cette période de circonstances exceptionnelles.

DES ASSOUPLISSEMENTS PÉRENNES DANS LES RÔLES DE CHACUN DES ACTEURS DE LA COMMANDE PUBLIQUE.

La mesure complétant l’article L2122-1 du CCP demeure celle qui a fait couler le plus d’encre durant l’examen de la loi Asap. Celle-ci permet de passer un marché sans publicité ni mise en concurrence, sans limite de montant, pour « un motif d’intérêt général ». Toutefois, dans sa fiche relative à la loi Asap, la direction des affaires juridiques du ministère de l’Économie et des Finances a pris soin de …

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rédigé par Me Antoine Angot

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