L’administrateur provisoire : une porte de sortie pour les entreprises en difficulté

Une entreprise peut être mise en danger par sa gouvernance ou par des conflits graves existant entre ses associés. Il est alors nécessaire de faire désigner un administrateur qui assurera la gestion courante le temps que la crise traversée par l’entreprise se dénoue.

DANS QUELS CAS EST-IL UTILE / POSSIBLE DE NOMMER UN ADMINISTRATEUR PROVISOIRE ?

Certains textes spéciaux peuvent prévoir expressément cette possibilité. C’est par exemple le cas pour ce qui concerne les indivisions, puisque le président du tribunal judiciaire peut, selon l’article 815-6 du Code civil, désigner un indivisaire comme administrateur. Des textes similaires existent pour les copropriétés, afin de permettre la désignation d’un administrateur provisoire en cas de carence du syndicat de copropriétaires ou du syndic.

En dehors de ces cas spécifiques, il est également possible de solliciter la désignation d’un administrateur provisoire lorsque le contexte s’y prête.

– Soit en ayant recours au mécanisme du tiers séquestre, à qui l’on va demander d’assurer la préservation d’un bien (des actions de société) ou d’un ensemble de biens (un fonds de commerce). Le séquestre doit alors assurer la conservation des biens en y apportant des « soins raisonnables » (C. civ., art. 1962), toujours dans l’idée « de préserver d’un péril imminent le bon fonctionnement ou les intérêts de la société » (Cass. com., 15 févr. 1983 : Bull. civ. IV, n° 66).

– Soit parce qu’il apparaît nécessaire et urgent de solliciter du juge la mise en place rapide d’une telle administration provisoire, que l’on justifiera en avançant qu’il s’agit de « mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ».

Concrètement, cette démarche suppose la plupart du temps la rédaction d’une assignation rédigée au nom de tout intéressé (dirigeant, associé commissaire aux comptes, voire créancier ou salarié) à comparaître devant un juge des référés dans un laps de temps court (quelques semaines voire quelques jours), signifiée aux personnes concernées (gérant, associés, société…).

Lorsqu’il y a consensus entre tous les intéressés, il est également possible de saisir le tribunal par la voie d’une requête conjointement signée.

Dans tous les cas, les juges rechercheront s’il est opportun de désigner un administrateur provisoire : « La désignation d’un administrateur judiciaire chargé d’un mandat général de gestion… constitue une mesure exceptionnelle destinée à remédier à une situation de crise aiguë de nature à paralyser le fonctionnement de la société et à mettre gravement en péril les intérêts sociaux » (Cass. 3e civ., 21 nov. 2000 : RJDA 3/2001, n° 321).

À noter que si cette formulation laisse supposer qu’il est indispensable de rapporter les preuves de l’existence d’une atteinte au fonctionnement normal de la société et d’un péril imminent la menaçant, il semblerait que certaines juridictions se contentent de l’une ou l’autre de ces causes pour justifier la désignation d’un administrateur…

Les motifs allégués sont donc divers : paralysie d’un organe délibérant (absence durable de quorum ou de majorité…), carence d’un organe de gestion (absence durable de gérant…), mésententes graves et bloquantes entre associés, irrégularités manifestes de gestion…

QUI PEUT ÊTRE DÉSIGNÉ EN QUALITÉ D’ADMINISTRATEUR PROVISOIRE ?

Mandataire « chargé par décision de justice d’administrer les biens d’autrui ou d’exercer des fonctions d’assistance ou de surveillance dans la gestion de ces biens », il est normalement choisi au sein de la profession réglementée des administrateurs judiciaires sur la liste établie par une commission nationale.

Dans certains cas, quand la situation nécessite que l’on ait recours à une personne pourvue d’une expérience ou d’une qualification spécifique, l’administrateur peut être choisi en dehors du corps susmentionné (C. com., art. L. 811-2, al. 2). La désignation fera l’objet d’une publicité pour …

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rédigé par Me François-Xavier Liber-Magnan